Le voici ! Encore désolée pour le retard, pour me faire pardonner le chapitre est long.
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Danny détestait l'océan. Il détestait les îles, il détestait Steve pour nager si facilement devant lui. Il détestait les mecs qui l’avaient emmené au milieu de ce foutu océan, il détestait qui que ce soit qui avait inventé les bateaux. Il détestait Rachel pour l’avoir fait déménager ici, et il détestait Stan pour tout le reste. Il détestait le monde entier, à l’exception de Grâce, et c’était cette pensée qui le maintenait, mouvement après mouvement, alors que ses épaules lui faisaient horriblement mal et que sa respiration devenait de plus en plus chaotique. Il nagerait des jours simplement pour s'assurer qu'il la reverrait.
Après leur saut dans l’océan, plusieurs tirs avaient sifflés autour d’eux. Ils avaient plongé pour y échapper. Steve l’avait aidé à plonger profondément vers l’arrière du bateau pour tenter de disparaitre aux yeux de leurs agresseurs. Le bateau avait continué son chemin, les tirs avaient fini par cesser, ils avaient pu reprendre leur souffle en toute tranquillité. Leurs kidnappeurs devaient penser que l’océan se chargerait d’eux. Danny n’était pas loin de penser comme eux. Il ne manquait plus que la blessure de Steve saigne et les requins auraient un chemin balisé pour les trouver. Depuis ils nageaient, de temps à autre Danny s’installait sur le dos pour détendre un peu ces muscles et il voyait bien que Steve malgré son entrainement souffrait avec sa main. De plus, il n’arrivait même plus à compter combien de fois il avait déjà bu la tasse, la fatigue le rendant moins concentré.
- Je pense que j’ai une crampe.
- Une crampe ?
- Oui, Steve, une crampe. Les gens normaux peuvent avoir des crampes.
- Quiconque dans notre situation va probablement avoir une crampe ou deux, Danny, répondit Steve.
- On n’y arrivera jamais, prophétisa le blond.
- On va y arriver.
- On ne sait même pas si on nage vers Hawaï ou si on s’enfonce encore plus dans l’océan.
Steve se retourna vers lui.
- On va y arriver, il y a des milliers de petits ilots, on va y arriver.
- Une idée formidable de sauter à l’eau, vraiment formidable.
- Merde Danny, t’avais une meilleure idée ? Et si t’en avais une, c’est trop tard.
Le silence le plus complet les enveloppa pendant de longues minutes…. heures ? Le temps était difficile à évaluer. Seule la position du soleil continuait d’indiquer à Steve qu’ils n’allaient pas dans une mauvaise direction mais impossible d’être précis ou même certain.
- Tu veux que je t’aide ? proposa Steve à son coéquipier quand il se le sentit s’enfoncer sous l’eau pour la 5ème fois en quelques minutes.
- Tu ne pourras jamais supporter mon poids très longtemps, nager et me soutenir. Même pour toi Super Seal c’est trop.
Le visage de Daniel était passé de la colère à l’épuisement et au découragement.
- Tu ferais mieux de continuer sans moi, je vois bien que je te ralentis. C’est toi le mec qui a un pouce déboité et c’est moi qui te ralentis. Plus qu’à sombrer.
- Danny, appela Steve.
- Non tu ne feras pas changer d’avis, nage plus vite, comme tu peux, avance, tu pourras peut-être chercher du secours.
- Danny !
- Je savais pourquoi je détestais l’océan, une prémonition.
- Danny ! cria-t-il cette fois bien plus fort en surnageant.
Danny s'immobilisa, grimaçant.
- Ouais ?
- Droit devant.
La voix de Steve paraissait éraillée. Danny cligna des yeux. Cela lui prit un moment pour laisser ses yeux d’habituer et son regard se fixer mais il le vit. Le rivage.
Dans une explosion d’énergie surprenante, il nagea, suivant Steve, jusqu’à ce que ses pieds touchent du sable, puis nagea encore. Il essaya de reprendre son souffle et de se lever alors que tout son corps fatigué et douloureux la lâcha. Le courant fort le balaya et il se retrouva dans l’eau, sous l’eau. Une main forte le rattrapa et le releva.
- Je t’ai mon pote.
Danny renifla, toussa, reconnaissant de la main ferme de Steve qui le maintenait debout. Steve donna une petite pression sur son bras.
- On y est presque.
Ils étaient à quelques dizaines de mètres du rivage mais l’eau était peu profonde. Steve l’aidait à avancer, le retenant quand l’eau reculait à chaque houle. Son amour propre aimait penser qu’il aidait également Steve, mais son esprit lui hurlait que Steve avait déjà dû vivre des situations bien pires. Et enfin, ils étaient sur un terrain solide, se frayant un chemin avec de l’eau jusqu’aux chevilles. Danny sentait son corps lourd et léthargique sans la flottabilité de la mer. Il trébucha quand il atteint la terre ferme, s’effondra sur le sable. Steve était juste devant lui, penché, les mains sur les genoux.
- Hé, s’exclama Danny. Steven…
Un coup de vent fit frissonner Danny, stoppant sa phrase. Steve se redresse et regarde par-delà l’horizon.
- On ne peut pas s'attarder ici, il faut qu’on trouve à se sécher.
- J’aimerai bien savoir comment.
Steve sourit.
- Allez.
Il tendit la main et Danny laissa à contrecœur Steve le tirer sur ses pieds, même si tout ce qu'il souhaitait, c'était s'allonger sur le sable froid et humide et se reposer quelques jours. Mais il suivit Steve sur la plage, passa devant les dunes et de grands palmiers gracieux qui se balançaient dans le vent.
- Où diable sommes-nous ? demanda Danny.
- Aucune idée, surement une des petites iles sous le vent, on naviguait plein ouest.
- C’est habité ?
- Pas vraiment.
D’accord, maintenant, il n’était pas loin de pleurer, il est fatigué, ses vêtements humides et lourds lui collaient à la peau et il n’avait pas de chaussures. Et même s'il ne faisait pas très froid, il frissonnait régulièrement. Danny jeta un coup d’œil vers la main gauche blessé de Steve. Elle s’était colorée et le blond pouvait jurer que plusieurs œdèmes se formaient. Le bout de chemise qui lui tenait le pouce avait disparu depuis longtemps. Pourtant Steve paraissait ne pas y penser comme si il avait été formé pour non seulement ignoré la douleur mais surtout pour souffrir les pires douleurs en n’en montrant rien.
- Nous devrions nous mettre à bouger, vers l’intérieur mais en restant parallèle de la plage.
Danny regarda ses pieds nus.
- T’as une idée de l’heure ?
Steve haussa les épaules.
- Aucune idée. On s’est fait enlever au petit matin, vu la position du soleil, une bonne partie de la journée est passée.
Ils n’avaient pas eu une nuit de sommeil depuis plus de 36 heures. La pluie chaude commençait à tomber dans une fine brume entraînée par le vent.
- Génial.
Danny poussa un grand soupir.
- Il n'y a rien que je préfère faire que marcher quelques miles sous la pluie en chaussettes.
- Au moins nos chaussures ne seront pas mouillées, non ?
- Ton optimisme est, est…, ennuyeux et irritant.
- Ouaip, sourit Steve qui se veut rassurant.
- Je suis trop fatigué pour faire face à cela, répondit Danny distraitement. Avec toi.
Il sait que cela n’a aucun sens. Mais il s'en foutait. Il était trop fatigué et mouillé et avait besoin de soins.
- Viens, Danny.
Avec une main dans le dos de Danny, Steve le guide vers un chemin dégagé.
- On va retrouver le chaud et le sec, tu te sentiras beaucoup mieux, je te le promets.
***
La pluie ne se stoppa pas, la nuit s’annonça et aucune présence humaine ne fit son apparition.
- Arrêtons-nous quelques instants, dit Steve.
- Avec plaisir.
Danny s’écroula au sol et ramena ses genoux contre la poitrine. Steve tomba à côté de lui, s’adossant contre un tronc d’arbre.
- Hey.
Il frôla son épaule contre celle de Danny.
- Nous y arriverons.
Danny se retourna pour lui faire face, le regard incertain. Un autre coup de vent, il claqua des dents involontairement.
- Tu es gelé.
- Toi aussi SuperSeal.
- Viens là, il faut faire attention. L’hypothermie peut être très dangereuse
Il enroula ses bras autour de Danny et le tira vers lui. Danny protesta, surpris par le geste. Sa voix étouffée contre l’épaule mouillée de Steve se fit murmurante :
- Je n’ai pas besoin de…
- Tais-toi, Danno, lui répondit son partenaire en resserrant ses bras autour de lui.
Danny se sentait ridicule. Il était un adulte, il n'avait pas besoin de se blottir contre Steve pour se réchauffer, mais il se rendait bien compte que Steve frissonnait aussi. Et puis c’était agréable. Même s'il était trempé, Steve était chaud et rassurant. Danny se retrouva à essayer de se rapprocher, de s'imprégner de toute cette chaleur, et peut-être aussi de cette affection. Il aimait la façon dont Steve le tenait, la façon dont Steve se blottissait contre les cheveux de Danny. Danny frotta énergiquement le dos de Steve puis passa ses bras autour de sa taille et finit par s’aplatir complètement contre le torse de Steve. La paire de menotte se balançait au bout de son bras droit dans un bruit métallique.
- L’hypothermie n’est pas une bonne chose, tu te souviens, dit Danny, la joue pressée contre le cou de Steve.
- Nan, je pense que vous essayez juste de monter sur mes genoux, renchérit le brun.
- Vraiment, c'est ce que tu penses ?
Steve resserra son emprise, rapprochant Danny, lequel se prit au jeu.
- Tu me veux sur tes genoux ?
Danny se bougea et s'installa sur les genoux de son coéquipier. Lequel lui glissa une main dans le dos.
- Vraiment Danno, tu es submergé par le romantisme du moment.
- Oui, vraiment c'est un moment très romantique.
Danny tourna la tête pour presser son nez contre les cheveux mouillés de Steve et peut-être qu’effectivement la situation a un petit quelque chose de romantique mais Danny ne l'admettra jamais.
- Toi et moi, mouillés, blottis l’un contre l’autre dans la forêt humide.
- Je pense que c'est assez romantique, répondit Steve. Le clair de lune, le bruit de l'océan…
- Clair de lune ? l’interrompit immédiatement Danny, la pluie battant son visage.
- Essaie plutôt les nuages et la pluie.
- La pluie est très romantique, souligna Steve buté.
- Bien sûr, avec le vent qui te frigorifie, la marche en chaussettes complétement trempées et n’oublions pas le bruit des coups de feu pour commencer, poursuivit Danny. Très romantique.
- Exactement.
Steve rit, son souffle chaud glissant sur la peau de son partenaire. Danny se sentait un peu étourdi, presque ivre. Ce devait être l'épuisement, ou bien la façon dont Steve lui caressait la nuque, les doigts jouant avec ses cheveux. Ou alors le fait qu'il était tranquillement assis sur les genoux de Steve, comme si réellement la situation n’était pas désespérée. Simplement parce que Steve le regardait avec une expression si pleine d'affection, comme s'il n'y avait pas aucun autre où il n’aurait préféré être, juste ici sous la pluie, enveloppant Danny de ses bras.
- Danny, chuchota Steve, les doigts enroulés autour de sa nuque.
Le blond se sentait tellement idiot. Ce devait être l'épuisement. Son cerveau avait dû être noyé, l’empêchant de penser distinctement, lui donnant des pensées extravagantes comme embrasser Steve. Il frotta une main sur son visage, puis lissa ses cheveux mouillés.
- Il faudrait qu’on se remette en route.
- Il va faire nuit Danno, impossible de se diriger. T’es crevé, ok, reprit-il face au regard de Danny, on est crevés, on passe la nuit et on avise demain matin.
- On sera morts demain matin.
- Nous survivrons jusqu'à ce que nous ... nous ne le fassions pas, déclara simplement Steve. Il n'y a rien que nous puissions faire à ce sujet.
- Tu es plutôt philosophe, marmonna Danny. Philosophe et déprimant.
Le silence se fit pendant plusieurs minutes, entre conscience et somnolence.
- Je ne peux pas mourir sans avoir eu une Porsche, je m’étais juré de moi aussi être un jour ce genre de crétin à s’acheter une Porsche quand Rachel a rencontré ce crétin de Stan.
Steve lui jeta un coup d'œil de côté.
- Danny. Tu possèdes une Camaro.
Le ton de Steve suggérait qu'une Chevrolet Camaro était aussi belle, sinon plus, que n’importe quelle Porsche. Danny roula les yeux.
- Non, tu possèdes ma Camaro.
- Danny…
- Putain, il fait tellement froid, je vais perdre mes doigts de pieds, et peut-être aussi ceux de mes mains.
Steve le frotta énergiquement avec sa main valide, cependant lui-même sentait ses forces le quitter, ses propres membres étaient froids et douloureux. Sa main et son pouce déboité était proche de la couleur aubergine.
- Je pensais que notre dernière conversation serait peut-être un peu plus profonde.
- De quoi parles-tu ?
- Merci Steve, merci d’avoir inventé ce mensonge débile pour m’aider, merci pour tout.
- Danny arrête !
- La vie est devenue super avec le Five-O, même si avec ta capacité à attirer les ennuis, j’aurai pu t’étrangler plus d’une fois.
- Danny tais-toi merde !
Steve se recula légèrement, mais Danny s'enfonça dans l'étreinte de Steve. Ce n'était pas une conversation qu'il voulait avoir avec Danny. C'était une conversation qu'il ne voulait jamais avoir avec Danny. La pensée de Danny abandonnant ... c'était juste trop à imaginer.
- Nous ne sommes pas encore en train de mourir, Danny. Ce n'est pas notre dernière conversation, d'accord ? Je refuse de prétendre que ça l’est. J'aurais d'autres choses à dire, si c'était le cas.
Et puis il serra sa mâchoire immédiatement parce qu'il n’avait certainement pas voulu dire ça. Cependant Danny avait très bien entendu.
- Qu'est-ce que ça veut dire ? demanda Danny tendu, se contorsionnant dans les bras de Steve, inclinant la tête vers le haut.
- Oublie ça, marmonne Steve, le visage contracté, regardant fixement un point fixe droit devant.
- Je ne le ferai certainement pas, dit Danny.
- Danny, soupira Steve
- Non, vraiment Steve ? claqua Danny d’une voix épuisée, se dégageant maladroitement de l’étreinte. Tu veux attendre que nous mourions pour me faire savoir tout ce que j’ai mal fait ? Tout ce que j’ai foiré ? Quoi, est-ce ma faute si nous sommes dans cette situation ?
- De quoi diable parles-tu Danny ? dit Steve éberlué de comprendre comment Danny a bien pu arriver à toutes ces conclusions.
- Si tu as des choses à me dire, alors dis-les !
Le blond avait les yeux rivés sur son ami.
- Pourquoi crois-tu que je pourrais te reprocher quelque chose ? Est-ce que je t’ai déjà donné l’impression que je me retenais quand j’avais quelque chose qui ne me convenait pas ? On va continuer à se battre, ici, maintenant ? Merde Danny.
Danny laissa échapper un souffle.
- Mais tu as dit…
- Oui, je sais ce que j’ai dit, admit Steve à contrecœur. Tu as mal interprété.
La colère s’évanouit rapidement et fut remplacée par quelque chose de doux et d’interrogateur sur le visage du blond.
- Alors quoi ?
Sa voie était un murmure.
- Bien, et bien… on ne va pas mourir, ok. Alors tais-toi, conclut Steve en retirant Danny contre sa poitrine. Tu gèles.
- Pas plus que toi.
Un mensonge et ils le savaient tous les deux. La peau de Danny est gelé contre le corps de Steve et il tremblait non-stop à présent.
- Comment va ta main ? demanda Danny après quelques minutes de silence.
- Je vais bien.
Un autre mensonge.
- Ne t’en fais pas pour ça.
- Je le fais quand même, répliqua Danny, sa tête reposant contre la clavicule de Steve. Ce n’est pas quelque chose que je peux vraiment contrôler.
Steve laisse retomber sa joue contre le haut de la tête de Danny. Le silence se réinstalla entre eux. Le Seal avait de plus en plus de mal à rester éveillé. Le froid l’engourdissait et le rythme régulier de la poitrine de Danny qui montait et descendait au rythme de sa respiration l’apaisait autant que l’endormait. Sa joue était toujours plaquée contre la tête de Danny, Danny n'avait pas bougé depuis un moment, mais Steve était plutôt confiant, le rythme de sa respiration indiquait qu'il était toujours réveillé. Sa main sur le dos de Danny avait cessé de faire des cercles depuis un moment, et il savait que ses doigts reposaient sur Danny mais il ne les sentait plus. Juste un sentiment de picotement. Son bras gauche, lui, était presque complètement engourdi. Steve ne savait pas s’il devait prendre cela comme une bénédiction car ainsi il ne ressentait plus la douleur. Ses yeux se fermèrent. Ses paupières semblaient si lourdes et sa volonté s’effritait. Il essaya de les forcer à s’ouvrir car il savait qu’il ne devait pas s’endormir. Il savait qu’il ne se réveillera certainement plus s’il le faisait. Il devait veiller sur Danny. Danny était son objectif, Danny devait vivre.
Il pensa que peut-être il devrait dire à Danny tout son amour maintenant. Peut-être était-ce l’un des derniers moments où il pourrait être totalement honnête avec l’homme de sa vie.
Toutes ces choses qu’il n’avait pas voulu avouer puisqu’ils n’étaient pas en train de mourir, ils ne pouvaient pas l’être. A présent il n’en était plus si sûr.
- Danny…
La voix de Steve fut un chuchotement paniqué mais il avait besoin de savoir si Danny était toujours éveillé. La réponse fut un grognement accompagné d’un léger changement de position.
- Ne t’endors pas, ok ? parvint à dire le brun, tremblant.
Il y eut un silence qui lui fit peur puis Danny murmura qu’il n’y arrivait plus.
- Essaie… Essaie plus fort Danno.
- Peut-être… peut-être qu’il est temps… tu peux commencer à parler maintenant.
Les mots de Danny furent marmonnés, mal articulés. Steve sentit son cœur se serrer douloureusement.
- Je pourrais être en train de me dégonfler.
Il y eut un silence, un silence effroyablement long que Danny brisa.
- J’arrive encore à sentir ta chaleur.
Steve savait que ce n’était plus possible, lui-même était complétement frigorifié, cependant il comprit ce que voulait dire Danny. Il en sourit. Ce fut sa dernière pensée avant de se rendre compte que quelque part sur le chemin il avait de nouveau fermé les yeux, et enfin plus rien.
***
Pardonnée ?